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« On est à la limite de la pornographie. »
Cet avis sévère sur « Frenchie Shore », téléréalité trashissime diffusée sur MTV France et Paramount +, ne vient pas d’une téléspectatrice lambda. Il a été formulé ce lundi soir par Rima Abdul-Malak, dans une interview au « Parisien ». La ministre de la Culture n’est pas la seule à être choquée. Selon nos informations, l’Arcom (l’autorité de régulation des médias) a déjà reçu plusieurs saisines sur cette émission lancée il y a dix jours.
« Frenchie Shore » et son contenu explicite
Produite par l’animateur Arthur, « Frenchie Shore » est la version française d’un format américain intitulé « Bienvenue à Jersey Shore ». Elle met en scène dix de nos concitoyens les moins farouches, enfermés dans une villa avec piscine du cap d’Agde (Hérault). Avec une seule mission : avoir des relations sexuelles entre eux. La promesse est vite tenue : dès le troisième épisode, une des jeunes candidates pratique une fellation à un de ses congénères au milieu du salon devant ses petits camarades assis dans un sofa.
Presque aucun pouvoir sur les plates-formes internationales
Trop pour Rima Abdul-Malak qui, malgré l’interdiction du programme aux moins de 16 ans qui apparaît clairement à l’antenne, demande à l’Arcom d’intervenir. « N’importe qui peut tomber dessus sur les réseaux sociaux, comme ça m’est arrivé. L’Arcom, contrairement à ce que j’ai pu lire, a compétence pour les plates-formes au titre de la protection des mineurs. Ce qui pose question, c’est l’accès aux mineurs, car on est à la limite de la pornographie, et c’est de la téléréalité. On n’est pas dans le registre de la fiction, d’un film ou d’une série, avec le recul que ça implique. Pour des adolescents qui vont se dire c’est ça la réalité des rapports humains, des rapports sexuels, ça peut être une entrée en matière catastrophique », a déclaré la ministre.
Du côté de l’Arcom, on ne cache pas trouver le programme « affligeant », comme nous le souffle un des membres de l’institution. Sauf que l’affaire est compliquée. L’action du gendarme de l’audiovisuel est encadrée par la loi. Il a le pouvoir de réguler les chaînes de télévision traditionnelles avec lesquelles il signe des « conventions », qui leur imposent des obligations en échange d’autorisations à émettre (financement du cinéma français et de programmes jeunesse, signalétique pour les mineurs). En revanche, les Sages n’ont presque aucun pouvoir sur les plates-formes internationales comme Netflix, Amazon Prime ou Paramount +.
« Une publicité contre le contrôle parental… »
La chaîne MTV France est éditée par ViacomCBS Networks International, firme basée à Prague (République tchèque). Et Paramount + a son siège à Berlin (Allemagne). Ces diffuseurs échappent à la législation française. « C’est le régulateur du pays d’implantation qui est compétent pour agir », nous affirme l’ex-Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), qui a donc décidé de transmettre ses saisines à die Medienanstalten, l’autorité allemande de régulation des médias, et à Rada pro rozhlasové a televizní vysílání, son homologue tchèque. À eux désormais d’étudier le dossier, ou pas.
Du temps d’Olivier Schrameck, l’ancien président de l’Arcom, plusieurs décisions ont été retoquées par le Conseil d’État, comme une des sanctions sévères prises contre Cyril Hanouna. Nommé en 2019, Roch-Olivier Maistre, lui, met un point d’honneur à rester dans le cadre de loi et à fuir toute décision politique ou morale.
Des conséquences sur le contrôle parental
« Cette émission est une publicité contre le contrôle parental… » se désole un expert des médias qui rappelle que la plateforme propose également des programmes pour enfants comme « La Pat’Patrouille », « Dora l’exploratrice » ou « Peppa Pig ». En attendant Tristan, Ouryel, Théo, Kara s’amusent toujours dans leur piscine. Face à eux, Loana et Jean-Edouard, les anciens héros de « Loft Story » (M 6), passent pour de chastes enfants de chœur.