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L’orgueil ou la surexposition de soi
François Saltiel, producteur et animateur du Meilleur des mondes (France Culture), auteur du Vendeur de thé qui changea le monde avec un hashtag et la Société du sans-contact (Flammarion)
« Le mécanisme des réseaux sociaux n’est pas une révolution, c’est une amplification de phénomènes existants. Prenons le cyberharcèlement, ce n’est qu’un renforcement dans le temps et dans l’espace du harcèlement scolaire qui a toujours eu cours. Mais il le rend tangible 24 heures sur 24, partout. Même le refuge de la maison n’existe plus, le bourreau poursuit sa victime jusque dans son lit.
C’est ainsi que ça se passe sur Instagram, X et compagnie : jour et nuit, nous nous confrontons à la vie des autres, nous leur livrons la nôtre. Mais notre récit est fabriqué, il donne une vision améliorée de nous-même, avec des outils adaptés qui permettent de l’embellir, comme les filtres, nous soumettant à une forme de recherche permanente de la performance. Les réseaux sociaux fonctionnent sur des valeurs métriques : ils quantifient les amis, les commentaires, les vues… ce qui crée des enjeux, des attentes qui poussent à une forme d’orgueil : qu’est-ce que je vaux ? Poster une image équivaut à dire : “Aimez-moi”, “Validez-moi” ; ou en tout cas : “Montrez-moi que j’existe”. Il n’y a rien de pire que de publier un contenu qui ne provoque pas d’engagement. En matière d’orgueil, il sera moins blessant d’obtenir une réaction négative que de ne récolter que l’indifférence, qui revient à se sentir invisibilisé.