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Huit mois après le suicide de Lindsay : harcèlement persistant sur TikTok
Huit mois après le suicide de Lindsay, collégienne harcelée dans son établissement scolaire à Vendin-le-Vieil, ses proches affirment être toujours victimes de propos haineux sur TikTok. L’avocat de la famille dénonce les manquements des réseaux sociaux en matière modération de contenu.
Propos haineux sur TikTok
Ces dernières semaines, des vidéos, hashtags et comptes d’une rare violence ont émergé des abysses de TikTok. « Lindsay enfin morte », « T’as bien fait de te suicider ». Des formules brutales, qui perpétuent le cyberharcèlement dont était victime Lindsay, adolescente qui s’est suicidée à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) le 12 mai 2023 suite à une vague de harcèlement scolaire.
Les proches de Lindsay également ciblés
Mais cette fois-ci, les propos haineux s’en prennent au frère de la collégienne, à ses parents et à sa meilleure amie, qui avait été exposée médiatiquement au début de l’enquête. Une situation « inacceptable », que dénonce Maître Pierre Debuisson, avocat de la famille, faisant état de l’horreur que continuent de vivre les proches de Lindsay, huit mois après son décès.
Plainte contre TikTok
Deux vidéos en particulier, ont poussé Maître Debuisson et les parents de Lindsay à déposer une nouvelle plainte contre TikTok pour « complicité de cyberharcèlement » et « non-assistance en personne en péril ».
Publication de vidéos violentes
Selon La Voix du Nord, l’une de ces vidéos était par exemple accompagnée du texte : « Je suis de retour ! Et oui, vous avez cru que j’allais arrêter ? Mais mdr jamais je vais arrêter ! Même si j’irais en prison je continuerais !!! » Des propos incrustés sur la photo d’une des quatre collégiennes mises en examen dans l’affaire.
Responsabilité des réseaux sociaux
La publication de telles vidéos sur les réseaux sociaux est un véritable choc pour les proches et la famille de l’adolescente, qui ne se sentent ni protégés, « ni soutenus par la justice ». Maître Debuisson, particulièrement remonté contre les juges du tribunal de Béthune qui font preuve « d’inhumanité » dans cette affaire selon lui, indique d’ailleurs que la famille songe à formuler une demande de dépaysement.
Incompétence des instances juridiques
Une façon pour les proches de Lindsay de dessaisir des instances juridiques considérées comme « incompétentes », au profit d’une autre juridiction.
Une responsabilité des réseaux sociaux dans le cyberharcèlement
À l’heure des intelligences artificielles et de progrès techniques incroyables, il est inconcevable que des propos haineux puissent perdurer sur les réseaux sociaux.
Pierre Debuisson, avocat de la famille de Lindsay
Mais surtout, l’avocat de la famille tempête face à « une ingérence des réseaux sociaux » face au cyberharcèlement vécu par Lindsay pendant plusieurs mois et persistant même après sa mort. « À l’heure des intelligences artificielles et de progrès techniques incroyables, il est inconcevable que des propos haineux puissent perdurer sur les réseaux sociaux. Je pose donc la question de leur responsabilité et de leur complicité dans la mise en danger d’autrui », argumente Me Pierre Debuisson.
Le règlement européen sur les services du numérique
En août 2023 est entré en vigueur le règlement européen sur les services du numérique, dit « DSA » (Digital Services Act), dernière réglementation de l’Union européenne en matière de régulation des grandes plateformes numériques.
Le règlement DSA oblige les plateformes comme les Meta à mieux lutter contre le cyberharcèlement en les obligeant à s’autoréguler et à rendre compte de la façon dont elles gèrent leur contenu, en termes de budget ou de délais de suppression par exemple », explique brièvement Marcel Moritz, maître de conférences en droit du numérique à l’Université de Lille. « Il est un peu tôt pour en tirer des conclusions, mais vu les sanctions prévues en cas de manquement, la réglementation pourrait être efficace. »
Vu les milliards de dollars qui risquent d’être impliqués, oui, on imagine que ça peut faire réfléchir les plateformes sur la question de la modération de contenu.
Marcel Moritz, maître de conférences en droit du numérique à l’Université de Lille
En cas de non-respect du DSA, des sanctions économiques peuvent être prises par la Commission européenne, comme des amendes qui, pour les très grosses entreprises, peuvent aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires mondial. « Vu les milliards de dollars qui risquent d’être impliqués, oui, on imagine que ça peut faire réfléchir les plateformes sur la question de la modération de contenu. »
Car malheureusement, selon Marcel Moritz, « une approche par la responsabilisation et par la sanction reste à peu près la seule chose qui peut encore fonctionner pour réguler le contenu sur les réseaux sociaux » et ainsi aider les victimes de cyberharcèlement s’engageant dans une bataille juridique disproportionnée, face à ces plateformes tentaculaires.

