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Le spécialiste des mesures d’audience en France en pleine mutation
Le spécialiste des mesures d’audience en France est en pleine mutation, pour refléter au plus près les nouveaux modes de consommation des programmes audiovisuels des Français. Explications.
Les méthodes de mesure actuelles
Chaque matin à partir de 9h, Médiamétrie délivre les audiences des programmes télés de la veille. Depuis sa création en 1985, cette société permet de mesurer et mieux comprendre les goûts des Français en matière de contenu télévisuel, et de « nourrir » la course à l’audience à laquelle se livrent les chaines. Son principal outil de mesure aujourd’hui repose sur des panels : le premier, dit « historique », regroupe 5000 foyers soit un peu plus de 11 000 individus, qui disposent d’un boîtier connecté à tous les téléviseurs de la maison et qui permet de lire une marque audio, inaudible à l’oreille, apposée par les chaînes dans la bande son de leurs programmes. C’est ainsi qu’on peut détecter qui regarde quoi, sur l’écran de télévision, et ainsi obtenir une moyenne nationale. Depuis mars 2020, il existe également un groupe de 3500 panelistes qui ont accepté de porter sur eux un audimètre miniature qui permet de mesurer toutes les consommations de contenus télévisuels, en dehors du domicile, tous écrans confondus (TV mais aussi smartphone, ordinateur et tablette). Ces mesures viennent s’ajouter à celles du panel historique. Quant aux chiffres de visionnage des contenus télévisuels en replay, ils sont également intégrés à la mesure à J+7.
Des changements majeurs pour refléter les nouveaux modes de consommation
Mais à l’heure où la durée passée devant le petit écran a diminué de 14 minutes entre 2019 et 2022, ces critères de mesure ne suffisent plus et Médiamétrie en est bien consciente. A partir de janvier 2024, c’est toute la consommation des contenus télévisuels faite sur un écran mobile, smartphone, tablette, ordinateur…à domicile, qui sera prise en compte dans les calculs d’audience. Un nouveau mode d’analyse qui va permettre de mieux représenter les comportements des spectateurs et leurs évolutions car aujourd’hui en France, nombreux sont les Français à ne plus avoir de téléviseurs chez eux. Quant au chiffre de visionages en preview, qui permet aux spectateurs de regarder un programme en délinéaire avant sa diffusion à l’antenne, il est pour le moment comptabilisé dans les audiences globales des chaines. Pour la communication programme par programme, le chantier qui débutera en octobre devrait prendre fin mi-2024. Petit à petit, ces changements devraient permettre d’avoir une vision plus précise des audiences. Car aujourd’hui, peut-on dire que 15 000 personnes représentent la France entière ? «
Complément d’information : C’est le principe même des études et du sondage, répond Laurence Deléchapt, directrice TV et Cross Média chez Médiamétrie. On représente la population, la consommation ou les comportements d’une population à partir d’un échantillon. Cette taille d’échantillon est savamment définie par les enjeux statistiques que l’on souhaite y mettre. Je pense qu’en France, on n’a pas de complexe à avoir sur nos mesures d’audience. On est très souvent comparé à nos homologues internationaux et placé en tête des pays les plus exigeants en termes de statistiques sur la mesure d’audience.
Les plateformes, un enjeu de transparence
Quid des plateformes ?
Parallèlement, la communication massive des chiffres de visionnage des plateformes semble en agacer plus d’un, car il s’agit là d’automesure, absolument pas encadrée. « Quand Netflix dit on a fait un succès, tel programme chez nous fonctionne mieux qu’un programme en linéaire ou quand un producteur nous dit ma série n’a pas fonctionné en linéaire mais elle fonctionne très bien sur Netflix, je ne sais pas ça veut dire puisque je n’ai pas les moyens de comparer, confie Tiphaine de Raguenel, directrice stratégie éditoriale à France Télévisions. C’est très important pour nous d’avoir des outils de mesure qui nous permettent d’y voir plus clair ». Même son de cloche du côté de Thomas Anargyros, président de Mediawan Studio France (H.P.I, Les Bracelets rouges, Dix pour cent…) : « Ce n’est pas possible qu’on soit réduit au chiffre que les plateformes veulent bien donner, balancer sans indication : on ne sait pas s’il est question d’un clic, d’une consommation de 30 secondes ou d’un épisode entier… Il y a vraiment un enjeu de transparence et de concurrence très important pour les chaînes de télévision ! ». Voilà donc l’un des autres grands chantiers de Médiamétrie qui sera de mettre en place d’ici fin 2024, une mesure liable et équitable de l’ensemble des usages de vidéos en streaming. « Notre vocation, confie Laurence Deléchapt, c’est de pouvoir apporter au marché une rigueur et cette fameuse transparence sur les chiffres, de proposer une mesure produite par un tiers de confiance, neutre et indépendant, avec des standards qui sont partagés et auditables. C’est important pour que le marché puisse se développer car le problème de l’automesure, c’est qu’elle ne garantit pas ce niveau de standard partagé et auditable, ni cette rigueur et cette transparence ». Ce nouveau système de mesure permettra, dans un premier temps, de connaitre les audiences réelles de chaque plateforme, puis dans un second temps, de connaitre les audiences des contenus et donc des gros succès. Si les principaux acteurs du secteur semblent jouer le jeu, les discussions demeurent néanmoins longues et complexes et soulèvent encore beaucoup d’interrogation du côté des chaines. « Il y a des enjeux qui sont importants pour chacun, il y a des intérêts qui sont parfois divergents et c’est notre rôle d’arriver à opposer une mesure qui fasse le plus grand consensus » analyse Laurence Deléchapt. Chez TF1, il reste encore des questions en suspens.
Complément d’information : Au Royaume-Uni, ils ont déjà fait cette évolution qui leur permet de comparer les chiffres de la BBC à ceux de Netflix… Et ce n’est pas toujours à l’avantage de Netflix…