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L’accès à une information de qualité : un enjeu crucial pour la jeunesse
L’accès à une information de qualité est un sport de combat auquel toute la jeunesse doit être formée. Son enseignement existe dans les établissements scolaires. Il s’appelle « EMI », pour éducation aux médias et à l’information. Toutefois, cette matière reste pour beaucoup un acronyme abscons, porté principalement par des professeurs, des enseignants et des journalistes passionnés. Et le temps qui lui est consacré en classe demeure anecdotique à l’échelle d’une scolarité. Or il existe aujourd’hui une urgence démocratique à renforcer l’EMI pour tous. Nous proposons d’instaurer une heure obligatoire par semaine pour tous nos enfants.
Un contexte d’information sans filtre et de défis déontologiques
Après Arras et le Hamas. Après Nicolas, harcelé à mort. Après la propagande d’Evgueni Prigojine – nous n’avons plus le choix. Nous devons impérativement aider les jeunes générations à comprendre les environnements informationnels. Nous sommes confrontés à une masse inédite d’informations et à une concurrence de points de vue qui s’expriment sans filtre tandis que les médias sociaux posent des défis déontologiques à nos sociétés. La révolution numérique a bel et bien changé notre rapport à l’information, comme le souligne le rapport du sociologue Gérald Bronner (Les Lumières à l’ère numérique, 2022).
La guerre informationnelle et l’importance de l’éducation aux médias et à l’information
« Est-ce bien nécessaire d’y consacrer autant de temps à l’école ? » s’interrogent les sceptiques. Oui. Il faut prendre conscience que nous faisons face à une guerre informationnelle. Les clercs de Donald Trump inondent les écrans des électeurs américains de mensonges habiles. Les groupes terroristes postent les mises à mort de leurs victimes pour recruter. Les harceleurs du numérique humilient leurs victimes nuit et jour. Ceux qui combattent les valeurs mêmes de nos démocraties bataillent sans relâche.
L’EMI : une grammaire pour redonner le contrôle de l’information à l’individu
Et nous ? Nous affrontons l’adversité sans arme. Dans ce contexte, les journalistes et les enseignants ne doivent plus mettre le genou à terre. L’éducation aux médias et à l’information devient aussi vitale que l’apprentissage du français et des mathématiques. Osons écrire qu’aujourd’hui même elle les surpasse.
Des compétences essentielles pour une nouvelle citoyenneté numérique
Ces compétences sont le socle indispensable d’une nouvelle citoyenneté numérique. Comme le recommandait la mission parlementaire sur l’éducation critique aux médias (février 2023) et sa rapporteure Violette Spillebout (Renaissance), l’EMI ne doit plus être une éducation « à » mais un enseignement à part entière. Encore conçue comme un enseignement transverse, ne serait-il pas temps de renforcer la pratique concrète dans les emplois du temps des élèves, notamment dès les premiers âges de la scolarité ? Une heure par semaine, donc, en plus de ce qui se fait dans les différents champs disciplinaires ou lors d’une action phare telle que la Semaine de la presse et des médias à l’école ? Avec une plus forte reconnaissance du rôle et de la place des professeurs documentalistes ?
Un partenariat essentiel entre l’école et les médias
Lors du Tour de France de l’éducation aux médias et à l’information, lancé par France Télévisions à travers tout le territoire, nous avons rencontré des professeurs engagés à Amiens, à Rennes, à Cayenne, à Paris, à Poitiers. Mais aussi des journalistes, confrontés aux demandes des établissements scolaires partout dans l’Hexagone, qui intègrent l’EMI comme une part prioritaire de leur métier. Professionnels de l’information et des médias, pédagogues, enseignants et formateurs de toutes disciplines, neurologues ou ingénieurs en informatique et en mathématiques appliquées partagent une expertise indispensable.
Conclusion : ne pas laisser la jeunesse désarmée face à la guerre informationnelle
Nous invitons donc les pouvoirs publics à cimenter ce partenariat « école et médias » pour permettre un changement d’échelle indispensable face au désordre informationnel auquel les enseignants doivent savoir répondre. Un jeune qui sait s’informer peut débusquer le vrai du faux. Décoder le complot. Débattre sereinement. Équipé des cinq W – who, what, where, when, why – en bandoulière, l’esprit critique doit être affûté. Comme l’écrit Sam Wineburg, professeur à Stanford : « Nous gérons notre argent en ligne. Nous trouvons l’âme sœur en ligne. Nous y choisissons notre restaurant. Nous y effectuons nos recherches. Et l’école devrait rester sur le pas de la porte… alors que le monde nous est livré sur un écran… ? » Il est de notre devoir de parents, d’enseignants, de journalistes de ne pas laisser notre jeunesse désarmée. C’est aussi celui des responsables politiques.
* Centre pour l’éducation aux médias et à l’information.