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Quels sont les signaux qui doivent vous alerter ?
Surtout, comment mieux gérer à la fois ces réseaux et l’interface que constitue votre smartphone ? Le Professeur Laurent Karila, médecin psychiatre à l’hôpital Paul-Brousse (AP-HP) et professeur d’addictologie à l’Université Paris-Saclay, répond à nos questions.
Comment savoir si l’on est ‘addict’ aux réseaux sociaux ?
L’addiction à ces plateformes n’est pas fondamentalement différente, par exemple, de celle au tabac. Pour la définir, je résume généralement les symptômes autour des « 5C » : une perte de contrôle, un usage compulsif, un craving (envie irrépressible), un usage chronique et enfin des conséquences sur sa vie. Si l’on observe cela sur une période d’un an au moins, alors le diagnostic est clair.
Vous évoquez les conséquences : quelles sont-elles ?
Cela peut peser sur la vie sociale, que ce soit à l’école, au travail, dans la famille, ou entre amis. Il y a aussi des aspects psychologiques : troubles de l’attention et de la concentration, tristesse, anxiété… On observe également des conséquences physiques, avec des myopies liées aux écrans, des douleurs aux articulations, ou encore une altération de la qualité du sommeil.
Parallèlement, on a vu émerger de nouvelles pathologies comme la nomophobie, peur d’être séparé de son smartphone, le syndrome FOMO (« fear of missing out »), lorsque l’on redoute toujours de manquer un événement, ou encore l’athazagoraphobie, crainte d’être ignoré ou oublié.
Quelle est la responsabilité des plateformes ?
Elles ont intérêt à vous rendre accro. Tout leur modèle économique est basé sur le fait que vous y passiez un maximum de temps, afin de pouvoir récolter des données personnelles, pour ensuite pouvoir vendre de la publicité ciblée à des annonceurs. Ces entreprises font donc tout pour capter et garder votre attention, en vous manipulant via des techniques de neuromarketing.
Elles jouent sur les interactions sociales : c’est une source facile de dopamine, le cerveau adore ça ! Amis, « followers », « likes » et autres réponses émotionnelles… Il s’agit de mécanismes de validation sociale qui reposent sur des schémas cognitifs très efficaces. Chaque « like », par exemple, est une récompense pour votre cerveau, qui vous encourage à poster plus et à passer davantage de temps sur le réseau.
Quels conseils pour reprendre le contrôle ?
Ce qu’il faut, c’est ménager au quotidien des temps où vous ne vous souciez plus de votre téléphone. Mettez-le par exemple en mode avion pendant 1 ou 2 heures, ou lors de vos interactions sociales. Si le fait d’aller sur les réseaux sociaux vous met en colère, vous rend triste ou anxieux, favorisez les contenus positifs. Essayez aussi de repérer ce qui déclenche votre besoin de connexion : est-ce l’ennui, la solitude, l’énervement… ? Privilégiez alors une activité de substitution comme la lecture, la musique, ou une promenade.
Si vous avez besoin d’aide, parlez-en à votre médecin traitant. Il saura vous orienter vers un psychologue clinicien spécialiste, ou bien vers un psychiatre addictologue. Il existe aussi des consultations pour les jeunes, qui peuvent apporter des solutions aux parents. Adressez-vous toujours à un vrai professionnel de santé, qui vous apportera une prise en charge globale.
Retrouvez la bio du Pr. Laurent Karila sur le site de l’Observatoire Santé PRO BTP